Il résulte des dispositions du règlement dit « Dublin III » que si un État membre de l’Union européenne
l'appliquant l est présumé respecter ses obligations découlant de l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, cette présomption est susceptible d’être renversée en cas de défaillances systémiques de la procédure d’asile et des conditions d’accueil des demandeurs d’asile dans l’État membre en cause, exposant ceux-ci à un risque de traitement inhumain ou dégradant prohibé par les stipulations de ce même article.
Saisi d'une demande d'annulation d'un arrêté de transfert à destination de l'Italie après accord implicite de reprise en charge, il appartient au Juge Administratif de rechercher si, à la date d’édiction de la décision litigieuse et eu égard aux éléments produits devant lui et se rapportant à la procédure d’asile appliquée dans l’Etat membre initialement désigné comme responsable au sens de ces dispositions, il existait des motifs sérieux et avérés de croire qu’en cas de remise aux autorités de ce même Etat membre du demandeur d’asile, ce dernier n’aurait pu bénéficier d’un examen effectif de sa demande d’asile, notamment en raison d’un refus opposé à tout enregistrement des demandes d’asile ou d’une incapacité structurelle à mettre en œuvre les règles afférentes à la procédure d’asile, ou si la situation générale du dispositif d’accueil des demandeurs d’asile dans ce même Etat était telle qu’un renvoi à destination de ce pays aurait exposé l’intéressé, de ce seul fait, à un risque de traitement prohibé par l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
Dans ce dossier, le Cabinet A&P associés représentait un demandeur d'asile d'origine malienne, parvenu clandestinement en Sicile en 2015, date à laquelle il aurait formulé sa première demande de protection internationale.
Par un jugement n°220517 en date du 23 janvier 2022, le Juge administratif, s'appropriant les arguments du requérant, a considéré, après avoir relevé que rien ne permettait de penser que la demande d'asile n'était plus en cours d'instruction en Italie, que les conditions d'accueil de l'intéressé, lequel avait été victime de persécutions, et l'écoulement d'un délai de plus de six années, traduisait l'existence de défaillances systémiques du pays d'accueil.
De ce fait, il appartenait au Préfet, de procéder à un examen des conditions effectives de prise en charge, appréciées à l'aune de la vulnérabilité du demandeur, lesquelles auraient du le conduire à considérer que les autorités italiennes étaient, à la date de l’arrêté attaqué, dans l’incapacité structurelle d’examiner effectivement sa demande d'asile dans un délai raisonnable.
Le Juge Administratif a donc annulé l'arrêté de transfert, et la décision concomitante portant assignation à résidence de l'intéressé.
Mieux encore, il a été enjoint au Préfet de procéder au réexamen de la situation du requérant au titre de l'asile.
Ce jugement, particulièrement motivé, interroge sur l'obtention d'un accord implicite en matière de reprise en charge d'un demandeur d'asile sur le fondement du règlement Dublin III.
Mais surtout, cette décision, qui vient accroitre les occurrences de défaillances systémiques de l'Italie en matière d'asile, pourrait permettre de contraindre les autorités administratives françaises à faire [meilleur] usage des dispositions de l'article 17 du Règlement Dublin III qui octroie au Représentant de l'Etat un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, s'il le décide, les demandes de protection internationale dont il est saisi.
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